Le malaise et le dégout croissant que nous ressentons vis-à-vis de ceux qui nous gouvernent avec maladresse me semble fondé sur quatre piliers dont le béton durcit chaque jour un peu plus. Mon humble point de vue sera ici simplement celui d’un employé d’entreprise privée, dont la survie professionnelle est sans cesse plus fragile et l’objet de remises en question fréquentes. Je sais, et tu sais (cher lecteur) que la question n’est pas « si » nous allons être licenciés un jour, mais « quand ». Le jeu est de durer ou sauter dans un autre bateau si possible et surtout d’avoir la chance de cotiser suffisamment de trimestres, pour une durée totale qui va s’accroître chaque année, telle une oasis que l’on verra s’éloigner au fur et à mesure que l’on aura soif et mal aux jambes fourbues de rhumatismes et de sciatique. Hi Hi.
UN : Le salarié 2011 est soumis dans un contexte professionnel très hiérarchisé à forte pression pour tenir son poste. Il est demandé des résultats précis, chiffrés, objectivés et mesurés. Les DRH du monde entier ont tissé des toiles vraiment serrées pour que le petit insecte ne déborde pas d’un cadre bien formalisé. Pour prétendre à garder un emploi, nous devons démontrer un mélange de « comportements » exemplaires et de « performances » bien au-delà d’un tranquille « 100% ». En revanche, les personnels politiques ne sont pas du tout (d)évalués malgré une vacuité démontrée à produire du résultat, voire à peine sanctionnés en cas de faute grave (ou exceptionnellement, si le « Canard Enchaîné » leur porte un coup fatal, qu’il en soit ici remercié). Nos élus évoluent mollement dans le temps d’un « mandat » (Ils l’occupent de A à Z, sous l’or des apparats et en principe sans risque). Nous demeurons au quotidien dans l’espace d’un « contrat » (de fait, de plus en plus périssable, oxydable et délocalisable).
DEUX : Je dois, dans la multinationale ou le grand groupe, pour passer de l’échelon N à N+1, déployer des trésors d’efficacité et un historique sans faille de qualité. Combien de fois avons-nous entendu parler d’envergure « supérieure », pour occuper un meilleur poste (parce que de nos jours, vous savez, « ce n’est plus aussi simple qu’avant »). De plus, postuler une seule fois et échouer dans le processus vous fermera la plupart des portes dans un avenir obscurci. Autant songer à préparer son CV et changer de crèmerie. Or que vois-je à droite comme à gauche ? Ces têtes toujours semblables, usées, repassées, retapissées au lourd passé d’inefficacité démontrée qui sans cesse briguent et briguent encore les magistratures suprêmes, voire y sont élues « par défaut ». D’un côté l’exigence, les résultats démontrables et de l’autre le hasard des urnes cumulé au vide des actions menées à bien (mais le pou s’accroche et finit par arriver en haut du crâne malgré tout).
TROIS : Côté élus, le cumul des mandats apparaît comme la démonstration formidable de l’impossibilité à accomplir un véritable travail. Vous et moi coulons sous le poids d’une fonction unique et dévorante, écrasés d’e-mails, noyés dans les procédures et corrodés par les coupures de budgets exigés par des actionnaires très gourmands. Les députés-maires- conseillers généraux-sénateurs-ministres peuvent surfer sur deux ou trois missions, de surcroît devant théoriquement être accomplies chacune à cinq cent kilomètre de distance. D’où le doute fondé sur la pérennité même de chacun de ces « mandats ». Nous cumulons les mandales dans la figure et prenons acte de l’ubiquité irréaliste de ces intérimaires multi-casquettes du spectacle public.
QUATRE : Les dirigeants ressemblent justement de plus en plus à des cadres d’entreprise par leurs discours et leur comportement. L’éloignement est grandissant entre les élites politiques, hypnotisés par leur façon d’être et paraître (de se transformer en cadres supérieurs) et d idéaux simplement « humains ». Construire un monde solidaire, cultivé et verdoyant n’intéresse aucun parti à visée majoritaire. Au nom d’une « real politik » tout converge pour finalement soigner des actionnaires, cajoler des millionnaires, vendre du nucléaire et des cartouches à fragmentation tout en nous expliquant depuis 1974 « qu’en Allemagne c’est mieux, parce qu’ils ont un tissu de PME qui exportent plus que nous, surtout de la machine-outil ». Ils ne « fréquentent » pas les dictateurs, ils font tourner l’outil industriel. Ils adoptent le langage codifié de l’entreprise et ses tics emplis d’une vacuité sans morale ni chaleur, mais, comme expliqué en UN, DEUX et TROIS, en omettant d’en importer les règles d’élimination en cas d’échec mesuré.
Résumons : le verbatim et le look du Privé, la dérèglementation en matière de cumul de postes du Public et toujours moins de résultats, une absence totale de vision « habitée » et de capacité à nous faire rêver. Vous ajoutez à cela leur faim jamais calmée pour les privilèges, les circuits opaques de financement de leurs activités de campagne électorale aussi sales que les égouts de Paris un 2 janvier après un réveillon trop arrosé et enfin des medias qui nous décrivent tous ces excès avec un luxe de détails. Que faire ? Que dire ? Solution rouge sang ? Révolution de jasmin ? Bien malin qui le saura ! À suivre…
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