vendredi 30 avril 2010

Ma raie noire



« Olympic Bravery » 1976, « Boehlen » 1976, « Amoco Cadiz » 1978 vous vous en souvenez ? Les images à la TV, le cormoran englué et les bretons furieux (à juste titre)…Les petits parisiens, nous donc, on venait l’été et on marchait sur la plage en Bretagne et on avait cette petite boulette noire qui venait saccager vos chaussures en plastique. Il fallait l’enlever ce pétrole avec du beurre ou un produit spécial qui sentait fort les solvants. Les chaussures en plastique ? Oui, vous savez celles qu’on appelait des « méduses » ou des « plastocs » et qui faisaient un peu mal, à cause de la boucle sur le côté ? Ceci dit l’avantage de ces « plastocs », c’était quand même de pouvoir marcher sur les rochers, en Bretagne, quand on allait à la pêche à pied, chercher des crabes à marée basse. Pieds nus, on glisse, ça pique, on va moins vite. Surtout quand on a une épuisette, un seau et une pelle et qu’on est toute une bande de copains. Et puis, quand j’y pense, je vous rappelle que les crabes, il faut les attraper en une prise ferme, par derrière et ils agitent alors en vain leurs pinces. Après, on les mettait dans un seau coloré avec des coquillages dessinés dessus, avec les crevettes et les gobies. Et quelques algues aussi. Souvent, il y avait bagarre et les gobies finissaient mal, d’ailleurs. Enfin, on rentrait de la pêche à pied et on pouvait prendre son goûter. Le meilleur, pour moi c’étaient les « Paille d’Or », framboise qu’on croque par rangée entière, c’est plus drôle ou les Figolu… voire le top du top, un pain au lait moelleux enveloppé dans le papier fourni par la boulangerie (sur lequel un jeune boulanger aux joues rondes pose devant un fournil, en un dessin un peu naïf) ET une barre de chocolat mauve (l’emballage, pas le chocolat). Et si en plus, on a quelques crocodiles, un barre de zan et des dragibus, la vie est belle. Après la pêche à pied et le goûter, la marée remonte on va faire un château de sable qui va résister quelques minutes à l’inexorable montée de la mer. Ou alors un parcours de cyclistes tout raides qui progressent au rythme de savantes trajectoires de billes lancées avec expertise dans des tracés bien lissés, incluant au moins un tunnel et deux ou trois ponts…Il y aurait du vent, quelques nuages, l’odeur de la plage en Bretagne. On changerait son maillot de bain en se tortillant dans une serviette et on aurait un peu froid. On se baignerait un peu, mais pas trop longtemps et surtout pas juste après le déjeuner, parce qu’il paraît qu’on peut mourir d’hydrocution si on se baigne moins de deux heures après le repas, c’est mon père qui me l’a dit. Mais s’il y avait des vagues, on resterait longtemps, sautant et criant dans l’écume, jusqu’à ce qu’on nous appelle quatre ou cinq fois….
Et un jour, on est grand, on pense à tout ça avec nostalgie.
Et les marées noires elles, continuent. Comme avant.

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