jeudi 25 mars 2010

Kingston Mines 02:00 am



Old Joe Mississipi est assis derrière sa batterie, imposant, mutique et portant son éternel petit chapeau rond. Tel un métronome de bronze, il bat la mesure avec puissance. A la basse, Peter « Buck » Slim Boy n’est pas un grand bavard non plus, mais il sourit plus. Rond et souple, son accompagnement se coule comme un serpent autour des rythmes du vieux Joe. Beau comme une Chevrolet Impala 1964. Charlie « Double Mike » commence le premier morceau directement sur sa Gibson en arrivant de derrière la scène, surchauffant le public par un long solo dans les aigus et Slimmy Minnie enchaîne directement au chant. Sa voix est puissante, éraillée et vous travaille à l’estomac comme un verre de Jack Daniels bu au réveil. Charlie, lui, garde toujours ses lunettes fumées, et cette paire là tient avec du scotch sur les branches. Dave Lavelle est borgne, mais fait ronfler les accords de son orgue Hammond, usé et poli par les années. Il ne se rappelle plus chez qui il l’avait acheté, d’occasion déjà, vers 1975, mais à un type de l’Illinois, ça c’est sûr. La salle est pleine, il est deux heures du matin, le blues est au rendez-vous. Pourquoi aurait-il fui ces lieux ? Il fait très chaud, les bières sont bues très vite, les margaritas s’évaporent et nous sommes tous un peu gris dans cette caverne qui résonne de sons noirs. Je commence à voir en double le néon rouge qui me dit « Budweiser ». Ah ! Un bœuf va commencer, l’ambiance est chaude comme un brasero dans Michigan Street ! Nous reconnaissons Peter Strangelove le boiteux qui monte sur scène pour se joindre au groupe de cette coquine de Slimmy Minnie. Il sort un par un des harmonicas de toutes ses poches et se met à se tortiller comme un ver coupé en deux, tout en mariant les accords avec ceux de la Gibson saturée. Slim Boy est en sueur lui aussi, il s’agit d’assurer, sa fille est dans la salle et sa sœur aussi, venue de Memphis, Tennessee, passer quelques jours en famille. Pause, mais ce n’est pas fini, Freddy Dangeroux est annoncé et chacun s’essuie le front, les mains et boit une gorgée ou deux, voire sort fumer dans la rue, en attendant qu’il s’installe avec sa célèbre Stratocaster bleue sur le coté droit de la petite scène, Le show reprend avec un classique de Muddy Waters, puis un autre de Willie Dixon, puis tout le monde attaque « Baby O’ blues », le single du dernier album du fantasque Dangeroux. La bonne humeur règne, mais chacun a négocié un petit solo pour faire valoir son instrument et sa voix. On peut dire que ça chauffe, la mayonnaise a pris, le public danse, hurle et les musiciens se tapent dans les mains à la fin du morceau. Allez, un autre petit classique de Chicago pour la route, vous l’avez tous reconnu. On ne va pas se coucher tôt, cette nuit encore.

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