samedi 19 juin 2010

De la misère en classe économique



Allez, une fois n’est pas coutume, un peu de dégommage en règle, plein de mauvaise foi. La classe éco en moyen-courrier de notre compagnie nationale aérienne est nulle.
Oui, je le dis, le niveau de confort est totalement pourri, le service rendu est pitoyable et l’expérience vécue est aussi agréable qu’un interrogatoire dans un commissariat nord-coréen. Mais oui (mauvaise foi manifeste, je le dis mais je rentre de voyage, alors…)
Si l’on mesure plus d’un mètre soixante-deux, on a les genoux qui touchent le siège de devant, ça fait mal, et dès que votre voisin ci-avant situé veut se pencher en arrière, votre tablette déployée vous fait subir une ablation de l’estomac.
Et puis, pour nous nourrir, les hôtesses nous distribuent, d’un air gêné, un minuscule sachet contenant huit cacahuètes et demi, voire deux biscuits fins comme l’esprit de Roland Barthes et accompagnés d’une boisson dans un format qui même chez les pygmées est synonyme de punition, tant cela est riquiqui.
Dans la poche aumônière, un magazine du mois dernier, fripé, froissé, avec des pages en moins et puis Marion Cotillard est graffitée dans sa pub pour un parfum avec des dents noires. C’est vrai, et d’ailleurs je fais souvent moi aussi des graffitis dans les magazines des compagnies aériennes. Mettre une cicatrice au Clooney et un bandeau de pirate plus le nez qui coule à la Moss, j’adore.
Et j’ajoute : ras le bol de ces magazines ineptes des compagnies aériennes qui vous donnent dix bonnes raisons d’aller à Shangaï et vous proposent une échappée à Ushuaïa.
Et sur quelle compagnie, on devrait prendre l’avion ? Oh, oh, oh, je crois le deviner.
Sans compter l’interview d’un architecte formidable qui a des lunettes comme YSL, une barbe comme Gainsbourg et a conçu au moins dix bâtiments formidables mais dans lesquels je ne foutrai jamais les arpions…
Et puis, et puis, l’incontournable page « hi-tech » avec toujours les mêmes I-pods, toujours les mêmes enceintes révolutionnaires de forme ultra design qui coûtent un bras de somalien plus une jambe de kirghize et n’oublions pas leurs putains de TV à écran plat, la voiture électrique qu’on connaît depuis dix ans et une montre avec des chiffres énormes en cristaux liquides. On s’en tape, à l’heure où on lit ça, on a faim, on a fini ses huit cacahuètes et on retarde le moment de manger la dernière demie qui reste. Dans ces magazines, de plus on voit maintenant Alain Delon et Brigitte Bardot aussi sur les publicités, mais quand ils avaient vingt ans hein ?, et moi -tout pareil-, je leur fais une moustache au Bic ou je mets des gros dollars dans leurs yeux. Comme ça, le prochain misérable voyageur en classe éco qui sera coincé dans ce pauvre siège exactement à la même place que moi, il ouvrira son magazine tout fripé et il pourra avoir un petit sourire, sachant que son vol est déjà en retard (« à cause d’une arrivée tardive », sic, en plus ils nous prennent pour des électeurs cubains hydrocéphales) , et qu’en débarquant il montera dans un bus glacial pour rallier le terminal afin de perdre encore vingt minutes pour attendre en bonus son bagage éraflé une demi heure supplémentaire et puis il fera la queue pour un taxi peu aimable qui fait semblant de ne pas prendre les cartes de crédit pour emmerder le monde et les employés qui n’ont plus de liquide pour régler ses notes de frais.
Merci la classe éco, on a fait un mauvais voyage, et oui, bien sûr on n’a pas le choix, on reprendra notre compagnie nationale aérienne, espérant grappiller assez de miles au bout de dix ans de Paris-Munich pour espérer avoir un Paris-Rome aller retour et encore, ces rats pingres, ils nous font payer les taxes d’aéroport alors le billet n’est même pas gratuit !
Et dire qu’en plus il faut se battre contre le site internet de réservation de voyages, gérée sans âme par des maigres employés situés à Budapest ou Varsovie de notre entreprise et qui par défaut nous propose ses low-cost flights via des aéroports atroces situés à quatre-vingt-dix kilomètres de toute agglomération.
Rien que pour ça, je veux un saucisson entier, du fromage à volonté et un bloody mary de 75 centilitres la prochaine fois que je pose mes fesses dans leurs sièges bleu marine durs comme le cœur d’un huissier !

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