vendredi 22 avril 2011

Avec une Kalachnikov, SVP



Dès qu’un crime, une attaque de banque ou un règlement de comptes est relaté par les news, l’on s’empresse de nous préciser que les abominables étaient munis de « Kalachnikov ». 
Arme mythologique, nom évocateur dont l’image métallique véhicule un puissant mélange de terreur et son petit parfum d’Histoire, tout en nous donnant des références connues. Si on vous cite d’autres marques de flingots, vous allez zapper et pour les journalistes, le mot est déjà dans le correcteur orthographique, alors… La Kalachnikov, c’est d’abord les Soviets, enfin les Russes d’avant (comme on dit « les Copains d’avant ») quand ils étaient menaçants et bien rangés. Ils chantaient de belles chansons, tous en chœur on les voyait qui défilaient sur la Place Rouge : ils avaient la pêche. L’avenir, c’était quand même plus beau, avant, non ? Depuis la chute du Mur, on sent bien qu’ils sont assez perturbés. Maintenant, ils deviennent tous maffieux ou capitalistes (pour les hommes) soit des top models maigres ou des prostituées (pour les femmes). Il n’y a plus que leur métro qui est beau, parce qu’il a été fait à la Grande Epoque, mais hélas il y a toujours un ado Tchétchène de vélo pour s’y faire sauter dedans de rage (et pas de rage de dents) et puis ensuite on le voit en boucle pendant les news, courir sur les séquences à gros pixels extraites des caméras de surveillance. 
Pour revenir au fusil d’assaut précité, il nous est dit que c’est une arme pas chère, facile à acheter et à démonter, de Badgad à Kaboul et d’Abidjan à Grattez-moi-là City. J’en vois rarement chez Simply et guère plus chez Monoprix, et pourtant c’est la semaine russe ; on y trouve ces gros cornichons délicieux ainsi que d’autres trucs pas mauvais du tout au rayon frais. 
Revenons sur le théâtre des conflits guerriers. Le rebelle de base, dans n’importe quelle révolution, en trouve aisément quand il va acheter ses cigarettes et c’est pour cela qu’il la brandit et tire en l’air avec conviction. Vous aurez noté que lorsqu’on possède sa Kalachnikov, il faut y scotcher des chargeurs de secours à l’endroit et à l’envers. Genre, pour être prêt à défourailler en tous sens dans les rues de votre quartier, transformé en charnier ou paysage d’apocalypse. C’est ballot cette histoire, cela donne un côté bricolage à votre tenue militaire pourtant soignée, avec un treillis seyant, un foulard noué autour de la tête et des lunettes de soleil pour finir d’achever votre look de héros. 
Quant à Mikhaïl K., qui a donné son nom à la sulfateuse, il a déclaré un jour : « Je préférerais avoir inventé une machine que les gens peuvent utiliser et qui aiderait des fermiers dans leur travail... par exemple une tondeuse. » 
Mais, pour envisager d’attaquer un bijoutier ou un bunker de dictateur, cela aurait été beaucoup plus délicat.   

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