dimanche 21 février 2010

L'optique d'Emile


L’an 2000 fait partie du passé. Loin et obsolète, déjà. Dix ans en arrière aujourd’hui semblent plus lointains que cinquante au 31 janvier 1999.
Et pourtant, que d’écrits, en se prenant pour Jules Verne ou Asimov, ont fantasmé sur cette date ronde, brillante et propre comme l’intérieur d’un vaisseau spatial imaginaire fonçant vers Alpha du Centaure. Le Captain Kirk et son équipage, tout sourire, allaient parler de nous aux indigènes des planètes conquises. Science-fiction.
En 2010, nous avons des téléphones vifs qu’on effleure et qui vibrent, des écrans très plats et des sites Internet pleins de couleurs, mais toujours des gros banquiers voraces et impunis, des illuminés barbus mauvais et superstitieux et encore pas mal de petits blacks et jaunes avec un gros ventre, des jambes grêles et le nez qui coule. Leur papa a été abattu par les rebelles. Ou les milices du gouvernement, ce n’est pas simple, Monsieur. Toujours les mêmes sangsues, l’argent roi, les mêmes dingues, autant d’assassins, de mercenaires, d’enfants-soldats et d’usines de munitions (sinon plus). La Bourse méprise la Vie, et les profits des compagnies pétrolières atteignent des sommets inégalés. Finance-fiction. Pour la majorité absolue des citoyens du monde copyright 2010, voter est comme pour Jules Verne à son époque cliquer sur une souris. Science-affliction. Fermez-la et surtout agitez bien les petits drapeaux quand le général-président du parti unique va passer. Chez nous, un gouvernement qui me donne envie de bailler en arc-en-ciel. Bonus : les saccages sur Dame Nature et pollutions accumulées nous conduiraient à la « big cata ». Je ne vous parle pas du nombre croissant d’agités qui mettent une divinité dans leur délire misanthrope et aussi misogyne. Allez, j’arrête la liste des choses vraiment pas belles qui seraient à relater, si toutefois nous avions un vaisseau spatial ayant atteint Alpha du Centaure et que le Captain Kirk et son équipage se mettaient en peine d’expliquer les faits marquants de notre planète aux indigènes, médusés et ouvrant leurs trois yeux bien carrés. Voyons les choses en positif. On peut louer un DVD au coin de la rue et voir un bon film quand on veut. On peut écouter le dernier Massive Attack sur Deezer à sa guise. On peut même donner en ligne à « Action contre la faim ». On peut lire chaque jour le blog des ouvriers de l’usine qui va être délocalisée et qui est déjà fermée. Et puis, après son rendez-vous chez l’ophtalmo parce qu’on a regardé trop longtemps des écrans, on peut toujours aller choisir des belles lunettes chez Optic 2000. Et ça, ni chez Goldman and Sachs, ni à Wall Street, ni en Corée du Nord, ni au Ministère de l’Immigration, ni chez Kalachnikov, ni chez les imams, les rabbins et les curés, ils ne pourront nous interdire de porter des jolies lunettes, 2000 sabords !

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