mercredi 2 décembre 2009

Le vieux navire


Le cimentier s’en va au cimetière,
Des vieux bateaux et des cargos brisés du dos,
Qui les sept mers ont rongé, en vieux loups pas amers.

C’est la dernière bordée, il accoste à Dakar,
Il se mange 1000 tonnes à fond de cale basse,
Crachote son diesel et fait son vieux drakkar.

Couvrant sa coque, 18 couches de barbouille,
Oxydées par l’amertume et les embruns,
La sueur des marins et quelquefois leur trouille.

Il se souvient…Il se souvient, héé

De ces routes à la carte, des traversées tranquilles,
De Banjul à Pointe-Noire, tout plein de mortier frais,
Ou quand à Port-Harcourt, ils ont raclé sa quille …

Il se souvient…Il se souvient, héé


De ces phares si beaux devant port San Pedro,
Des grandes baleines calmes et du vert Atlantique,
Ou de ces quais si chauds devant Mogadiscio …

Il se souvient…Il se souvient, héé


Des grains noirs et fâchés, et des vagues à valser,
Des commandants scotchés, des marins sans vergogne,
Des mousses un peu bourrés et du port de Tanger…

Il se souvient…Il se souvient, héé


De ses noms « Ville du Caire » ou bien « Ocean Mist »,
De ses armateurs grecs, d’un pavillon maltais,
Des odeurs des camions, d’une grue un peu triste.

Il se souvient…Il se souvient, héé


Le cimentier s’en va au cimetière,
A la fin de l’année, en route vers Bombay,
Pour voir ses flancs rouillés transformés en cuillères .

Espérant aussi la réincarnation,
Au paradis naval des navires bien loyaux,
En trois mâts de parade, fierté de la nation.

Le cimentier s’en va au cimetière
Plus de gri-gri mais un passé tout gris
D’une vie passée, il peut en être fier.

Il se souvient…Il se souvient, héé
Il se souvient…Il se souvient, héé

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